Lecture analytique du Mariage de Figaro
Bambi
Le théâtre, texte et représentation Lecture analytique n° 3 Beaumarchais, Le Mariage de Figaro, acte V, scène 3 Figaro, seul, se promenant dans l’obscurité, dit du ton le plus sombre : O femme! femme! femme! créature faible et décevante!… nul animal créé ne peut manquer à son instinct: le tien est-il donc de tromper?… Après m’avoir obstinément refusé quand je l’en pressais devant sa maîtresse; à l’instant qu’elle me donne sa parole, au milieu même de la cérémonie… Il riait en lisant, le perfide! et moi comme un benêt… Non, monsieur le Comte, vous ne l’aurez pas… vous 5 ne l’aurez pas. Parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie!… Noblesse, fortune, un rang, des places, tout cela rend si fier! Qu’avez-vous fait pour tant de biens? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus. Du reste, homme assez ordinaire; tandis que moi, morbleu! perdu dans la foule obscure, il m’a fallu déployer plus de science et de calculs pour subsister seulement, qu’on n’en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les Espagnes: et vous voulez jouter… 10 On vient… c’est elle… ce n’est personne. – La nuit est noire en diable, et me voilà faisant le sot métier de mari quoique je ne le sois qu’à moitié! (Il s’assied sur un banc.) Est-il rien de plus bizarre que ma destinée? Fils de je ne sais pas qui, volé par des bandits, élevé dans leurs moeurs, je m’en dégoûte et veux courir une carrière honnête; et partout je suis repoussé!